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La Révolution de l'Énergie Verte en Afrique du Nord : La Stratégie du Maroc et de l'Algérie

Marc-Antoine LebrunRédacteur en chef
Mis à jour le: 16/11/2025 23:09:23

La révolution de l'énergie verte en Afrique du Nord : la poussée stratégique du Maroc et de l'Algérie

L'Afrique du Nord, une région longtemps définie par ses vastes réserves de combustibles fossiles, connaît une profonde transformation. À l'avant-garde de ce changement se trouvent le Maroc et l'Algérie, deux nations qui exploitent leur immense potentiel solaire et éolien pour devenir des leaders mondiaux de l'énergie verte. Grâce à des stratégies gouvernementales ambitieuses, à la mobilisation de capitaux internationaux et à une approche visionnaire en matière de commerce et de logistique, ils ne visent pas seulement l'indépendance énergétique, mais se positionnent comme des fournisseurs clés pour un monde en pleine décarbonation. Ce virage stratégique remodèle leurs économies, crée de nouvelles alliances géopolitiques et offre un modèle pour un avenir durable.

Maroc : un modèle pour un avenir vert

Le Maroc s'est imposé comme un pionnier régional dans le secteur des énergies renouvelables, porté par une stratégie nationale claire et ambitieuse. Le Royaume s'est fixé l'objectif audacieux de produire 52 % de son électricité à partir de sources renouvelables d'ici 2030, certaines projections suggérant que ce chiffre pourrait atteindre 90 % d'ici 2035.

Une stratégie nationale ambitieuse

Le gouvernement marocain a été le principal catalyseur, actionnant d'importants leviers pour réduire les risques liés aux investissements et créer un environnement réglementaire favorable. La stratégie est gérée par un trio d'institutions puissantes :

  • MASEN (Agence Marocaine pour l'Énergie Durable) : Responsable du développement et de la gestion des projets d'énergies renouvelables.
  • ONEE (Office National de l'Électricité et de l'Eau Potable) : Le service public de l'État chargé de la production, du transport et de la distribution d'électricité.
  • ANGSPE (Agence Nationale de Gestion Stratégique des Participations de l'État) : Supervise la performance et la coordination stratégique des entreprises publiques, en veillant à leur alignement sur les objectifs nationaux.

Cette approche coordonnée a permis le lancement réussi de projets de renommée mondiale et a attiré d'importants investissements étrangers.

Projets et initiatives phares

L'engagement du Maroc est parfaitement illustré par ses projets à grande échelle :

  • Le complexe solaire Noor Ouarzazate : L'une des plus grandes centrales solaires à concentration (CSP) au monde, ce projet phare témoigne de la vision du Maroc.
  • Programme d'énergie verte industrielle : Récemment, le gouvernement a signé un accord historique pour fournir 5 gigawatts (GW) d'électricité propre spécifiquement pour le secteur industriel d'ici 2030, visant à décarboner sa base manufacturière et à renforcer sa compétitivité à l'exportation.
  • Développement de l'hydrogène vert : Le Maroc développe activement sa capacité en hydrogène vert, le considérant comme une source d'énergie cruciale pour l'avenir et un produit d'exportation de grande valeur, en particulier pour le marché européen.
  • Production de véhicules électriques (VE) : Le pays développe également sa production locale de véhicules électriques, créant un marché intérieur pour son énergie propre et bâtissant un nouvel écosystème industriel.

Algérie : le réveil du géant solaire saharien

Tandis que le Maroc a fait la une des journaux, l'Algérie, un géant traditionnel du pétrole et du gaz, prend conscience de son propre potentiel renouvelable colossal. Avec l'un des niveaux d'irradiation solaire les plus élevés au monde, le vaste désert du Sahara confère à l'Algérie un avantage naturel inégalé.

Objectifs nationaux en matière d'énergies renouvelables

Le gouvernement algérien a lancé ses propres plans ambitieux pour diversifier son mix énergétique et réduire sa dépendance aux hydrocarbures. Le pays vise à installer 15 GW de capacité d'énergie renouvelable d'ici 2035. La stratégie est principalement menée par les géants énergétiques publics Sonatrach (pétrole et gaz) et Sonelgaz (électricité et gaz), qui réorientent progressivement leurs activités pour inclure des projets renouvelables à grande échelle.

Projets clés et domaines d'intervention

La stratégie de l'Algérie est fortement axée sur l'exploitation de sa géographie saharienne pour la production d'énergie photovoltaïque (panneaux solaires).

  • Projet solaire « Tafouk1 » : Il s'agit d'un projet solaire prévu de 4 GW, qui s'inscrit dans une initiative plus large visant à construire des parcs solaires à travers le pays.
  • Initiative « Desert-to-Power » : L'Algérie est un partenaire clé dans les initiatives à l'échelle du continent visant à exploiter le potentiel solaire du Sahara pour un usage domestique et pour l'exportation.

Le principal défi pour l'Algérie consiste à faire passer son économie et ses infrastructures d'un siècle de domination des hydrocarbures à un nouveau paradigme d'énergie verte.

L'hydrogène vert : la nouvelle frontière

L’hydrogène vert est produit en séparant l’eau en hydrogène et en oxygène à l’aide d’électricité renouvelable. Pour le Maroc et l’Algérie, avec leur soleil et leur vent abondants, cela représente une opportunité monumentale. Ils peuvent produire de l’hydrogène vert à un coût compétitif et l’exporter vers l’Europe pour alimenter l’industrie lourde, les transports et la production d’électricité, devenant ainsi les exportateurs de « pétrole vert » du 21e siècle.

Leviers gouvernementaux et marchés des capitaux

L'ampleur de cette transition énergétique nécessite des capitaux immenses, et les deux gouvernements ont utilisé de puissants leviers pour les attirer. Leurs approches, bien que toutes deux menées par l'État, présentent des différences notables.

Cadres politiques et réglementaires

Le Maroc s'est fortement concentré sur la création d'un cadre stable et attractif pour les partenariats public-privé (PPP) . En offrant des garanties gouvernementales, des réglementations claires et des agences dédiées comme MASEN, il a réussi à attirer de grands développeurs et financiers internationaux.

L'Algérie s'est traditionnellement appuyée sur un modèle dirigé par l'État, mais s'ouvre progressivement aux investissements directs étrangers (IDE) dans le secteur des énergies renouvelables. De nouvelles lois sont en cours d'adoption pour encourager les partenariats internationaux, reconnaissant que la rapidité de la transition dépend des capitaux et de l'expertise externes.

Attirer les investissements

Une comparaison des environnements d'investissement met en évidence leurs stratégies distinctes :

CaractéristiqueMarocAlgérie
Stratégie principale Proactive, orientée vers l'exportationPriorité nationale, sécurité énergétique
Institutions clés MASEN, ONEESonelgaz, Sonatrach
Modèle d'investissement Cadre solide de partenariats public-privé (PPP)Dirigé par l'État, s'ouvrant progressivement aux IDE
Financement international Fortement intégré (Banque mondiale, BEI, BAD)Partenariats et accords bilatéraux croissants

Le rôle du commerce et de la logistique

La transition vers une économie de l'énergie verte ne se limite pas à la construction de centrales électriques ; elle exige une refonte complète des infrastructures commerciales et logistiques.

Construire une infrastructure d'exportation d'énergie

Un élément clé de la stratégie du Maroc est son rôle de « pont énergétique » vers l'Europe. Cela implique :

  • Interconnexions électriques : Des câbles sous-marins existants et prévus reliant le réseau marocain à l'Espagne, permettant l'exportation directe d'électricité verte.
  • Logistique de l'hydrogène vert : La planification des futures exportations comprend le développement d'infrastructures portuaires capables de traiter l'hydrogène liquéfié ou l'ammoniac (un vecteur d'hydrogène) et potentiellement la reconversion des gazoducs.

Décarboner l'industrie et les chaînes d'approvisionnement

L'accès à une énergie verte abondante et bon marché devient un avantage concurrentiel essentiel. Alors que l'Union européenne met en œuvre son mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF), les biens produits avec des émissions de carbone élevées seront soumis à des taxes. En alimentant leurs industries avec des énergies renouvelables, le Maroc et l'Algérie peuvent garantir la compétitivité de leurs exportations, attirer des industries manufacturières vertes et assurer leur place dans les chaînes d'approvisionnement mondiales.

Le dilemme des hydrocarbures

Pour un pays comme l’Algérie, où les revenus du pétrole et du gaz constituent le socle du budget national, la transition énergétique représente un défi de taille. Elle exige un exercice d’équilibrage délicat : gérer le déclin d’une industrie historique tout en investissant simultanément dans une nouvelle, le tout sans provoquer de perturbations économiques ou sociales majeures. Cela implique de reconvertir la main-d’œuvre, de diversifier l’économie et de gérer les finances publiques avec prudence.

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Marc-Antoine Lebrun
Rédacteur en chef
Passionné de finance et de nouvelles technologies depuis de nombreuses années, j’aime explorer et approfondir ces univers fascinants afin de les décrypter. Curieux et toujours en quête de connaissances, je m’intéresse particulièrement aux crypto-monnaies, à la blockchain et à l’intelligence artificielle. Mon objectif : comprendre et partager les innovations qui façonnent notre futur.
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